Heureux soient les fêlés car ils laissent entrer la lumière ¤ Silas

Ah Lys ! Belle cité à la cuisine raffinée et aux mœurs légères. Cité des plaisirs où se rendent tous les jeunes nobles westerosiens en quête d’expériences en tous genres.
Elle est l’île la plus méridionale située dans la mer d’Eté, et la plus peuplée. Là-bas vous rencontrerez principalement des têtes blondes aux yeux azur et au teint pâle. Les lysiens sont reconnus pour leur beauté. Raison pour laquelle il y a un certain nombre d’esclaves sexuels à Lys. Le plaisir, l'amour charnel est au centre de cette societé héritière de l'antique Valyria. Le mariage aussi tient une place particulière. Les notables prennent femme mais possèdent sans ambages, de nombreuses concubines. Le patriarche de la richissime famille Vaar n'y fait pas excéption. Rien de plus normal que d'exposer esclaves de lit et maîtresses officielles comme signe extérieur de richesse dans un état où l'érotisme est élevé au rang d'art.

Décadence et guerre, commerce et opulence... C'est dans ce contexte qu'est né celui dont nous allons vous conter l'histoire. Une histoire singulière pour un homme tout aussi singulier. Il est le fils d'Istarios Vaar, grand négociant de Lys et accessoirement oeuvrant dans la piraterie et le recel. Un armateur peut regarder sur les emplois de ses navires. Une flotte que l'on reconnait à ses voiles de soie et ses coques peintes de violet et d'or. Dryden - qui est son nom véritable - est aussi fils de la favorite des concubines, la plus belle d'entre-toute, du nom de Naamah. Istarios la couvrait d'attention, nourrissant les jalousies et les ambitions des autres dames de sa cour. On peut savoir à quel point les femmes peuvent se montrer redoutables dans ce genre de cas, n'est-ce pas ? Mais la menace fut toute autre, tenant une grande part dans le mysticisme et la superstition que la jalousie sourde et froide.

L'enfant naquit mais ne connut la chaleur réconfortante d'une mère aimante qu'à peine quelques mois. Un matin, des cris d'effroi réveillèrent toute la maisonnée. Elles étaient six, six concubines et leurs enfants, étouffés dans leur bile et leur propre sang. L’œuvre du poison sans nul doute mais aussi de la folie d'une femme, l'épouse d'Istaros, persuadée par une prêtresse Rouge qu'elle perdrait place et légitimité avec la naissance d'un fils. Une tragédie comme il en existe pourtant peu à Lys. Dryden ne dût son salut qu'à une servante attachée à son père, femme d'un petit alchimiste sans envergure. Dès lors, le poupon trouva une seconde mère avant même d'en prendre conscience. Elle s'appelait Elyssa. A défaut de richesses et d'opulence, le petit garçon grandit dans l'affection mais aussi, le secret. Son existence même ne devait être révélée car le bourreau de Naamah n'aurait de cesse de le pourchasser.

Tyrios, son mari conclut que Dryden était un génie quand l'enfant parla avant même de marcher, et bien avant apprit-il à lire avec tant de facilité. Enfant, il volait quelques livres dans la petite bibliothèque de son "père" pour se faire lui-même sa propre instruction, curieux, avide d'en savoir toujours plus encore. Fier dans un premier temps, la nature humaine nourrie par une ambition, le regret d'être un scientifique mésestimé firent que Tyrios vit en Dryden, une occasion de s'élever dans sa profession. A dix ans, il installa un laboratoire précaire dans le sous-sol de leur maison où le jeune garçon fit ses premières créations. La tenancière du bordel voisin fut sa première client et lui demandait de fabriquer des lotions et des médicaments pour ses filles. C’est ainsi que la « carrière » de l’alchimiste commença. Entre temps devenait-il une attraction dans les cercles alchimiques de Lys. Attraction à la fois intellectuel mais aussi... et malheureusement, charnelle. Elyssa n'en sut jamais rien. Il avait à peine quinze ans. Mais à ses yeux, que valaient cette innocence pour un peu plus de connaissance ? Son esprit tournait différemment, d'autres l'apprendraient à leurs dépends.

L’adolescence passait lentement. Dryden vivait dans son petit monde solitaire et sombre, dans ce petit sous-sol réorganisé. Il sortait bien peu souvent n’arrivant pas à apprécier la compagnie des jeunes gens de son âge et peu apprécié ou plutôt considéré par les adultes en dehors de ces vieux boucs à l'odeur de naphte bien écœurante. Son esprit était verrouillé sur les sciences quand la sociabilité ne l’intéressait pas. A son tour de nourrir l'ambition, la reconnaissance comme Tyrios l'avait fait avant de quitter brutalement ce monde. Elyssa quant à elle, était sa seule joie, son seule lien avec "le monde du dehors". Veuve, elle attirait les convoitises car la richesse des dons de son fils eurent tôt fait d’agrémenter leur quotidien. Remariée, Dryden comprit de lui-même qu'il devait faire son chemin, à son tour. Lys lui aurait déjà tout appris ?

Dryden commençait à se faire connaître, à peine âgé de dix-sept ans, grâce à ses « produits-miracles » qu’il vendait un peu partout et à tout le monde dans les rues de Lys. Formé par un grand maître des potions, scientifique à ses heures qui confirma que le jeune homme était le plus brillant jamais rencontré dans ce domaine. Il s’était épris de passion pour l’alchimie et ne reculait devant rien pour tester ses talents. Mais cela rendait l’investissement financier plus important alors celui qui se fit nommer Silas, par précaution, apprit –seul, comme pour le reste- à ruser, à charmer parfois, à manipuler les esprits inférieurs pour obtenir ce dont il avait besoin. Malgré tout il lui fallait de la monnaie sonnante et foisonnante, alors le blondinet se mit à jouer parfois incognito dans les tavernes. Sa cervelle lui permettait de dépouiller proprement ses adversaires… Et lui rapportait autant d’ennuis, combien de fois Elyssa a dû le recoudre. Il accumulait tout de même quelques dettes en plus de ça. Et cette excuse fut la bonne pour enfin bouter ce gamin hors de Lys. En effet, dans la cité, les dettes peuvent conduire un homme à devenir esclave. L'épouse Vaar entendait bien user de ce subterfuge pour enfin se débarrasser de la mauvaise herbe de leur jardin.  

Les fantômes du passé ne se sont jamais manifesté jusqu'à ce que Dryden atteigne presque ses 20 ans. La rumeur, les secrets ne peuvent se taire éternellement. L'épée de Damoclès qui planait au dessus de sa tête finit par s'abattre sur lui tandis qu'il n'a aucune conscience de ce qu'il a bien pu faire de mal ? Le seul héritier mâle d'Istarios Vaar était encore en vie, il devait disparaitre non plus pour une sombre affaire d'oracle mais maintenant, de puissance au sein des notables de Lys. La vérité, le jeune homme l'apprit de sa "mère" le conjurant de quitter la cité-libre pour de bon. Ce fut un vrai déchirement, l'une des rares émotions qu'il avait pu ressentir dans sa vie.

Il vogua longtemps d’une cité à l’autre jusqu’à s’établir à Braavos. Territoire prometteur et assez riche en diversité pour satisfaire sa curiosité dévorante. Et il ne fut pas déçu loin de là. Son sens de la comédie, mais son talent, son esprit vif et génial lui permit d'aborder de grands scientifiques de la cité-libres. Il n'eut même pas besoin de vendre son âme ou sa chair pour cela, ses connaissances déjà grandes firent le gros du travail. Et même si ses petits commerces purent reprendre également dans la cité, il décida de se faire enrôler parmi les mercenaires, histoire de voir d'autres horizons. L’idée lui paraissait bonne car si le blondin était habile aux jeux de l’esprit… Pour ce qui était de se battre, ce n’était pas chose aisée. Et cela avait bien changé. Sans être le plus doué ni le plus fort ou même le plus féroce avec sa silhouette svelte, il était par contre extrêmement habile et rapide. Sa connaissance du corps humain fit aussi qu’il finit par ne plus manquer sa cible. Frapper au bon endroit peut parfois mieux servir que frapper fort. Mais finalement, la guerre n'était pas son monde. Il croisa la route d'un homme qui changerait son destin pour la première fois.

Le jeune homme reprit les jeux occasionnels mais un jour à vouloir jouer au plus fin, il se retrouva entièrement nu sur les routes désertes de Braavos avec sa seule dignité pour l’habiller et ses cheveux mi-longs ondulés pour seuls vêtements. C’est ce jour-là –il fallait forcément une situation incongrue- qu’il rencontra Oberyn Martell le jeune Prince dornien. Malgré toutes ses bizarreries, Silas sembla à son goût car ils s’entendirent mieux que bien… Après quelques moments d’intimité partagés de ci de là –qui confirmèrent d’ailleurs sa préférence aux hommes-, la discussion s’engagea finalement et ils se trouvèrent également un certain nombre de points communs. Oberyn était brillant en plus d’être séduisant, il possédait bien des connaissances et avait le même amour que lui pour les poisons et autres décoctions. Silas eut l’impression d’avoir rencontré un égal, bien que lui soit Prince et le lysien… Rien du tout. En tout cas, il était à la fois fasciné et charmé par cette personnalité. Rien d’émotionnel cela va sans dire. Mais un genre d’amitié qui perdura toute la durée du séjour effectué par le Dornien. Et même au-delà car Silas n’ayant pas suivi le Prince à Dorne, ils s’écrivirent parfois…

Jusqu’à ce que Silas ne rejoigne Lanchélion sept ans plus tôt. Il n’avait plus rien à apprendre de Braavos et une partie de lui nourrissait l’ambition de se mettre au service de cet homme fascinant connu jadis. Une drôle de lubie mais le blondinet se comprenait lui-même. Ni une ni deux donc, il s’installa à Dorne où il devint l’alchimiste du Prince mais aussi son homme de confiance. Rares étaient les voyages dont il ne faisait pas partie. Il était même présent lors de la mort de son ami. Un souvenir terrible que le hanterait jusqu'à sa propre mort. Abattu, atterré par la disparition de son ami, amant, confident et surtout Prince, il mourrut lors de l'attaque de la flotte Martell venue venger la Vipère et menée par Ellaria Sand qu'il continue de protéger par loyauté, pour la mémoire de son amant et ami perdu et par sympathie envers la Sand. Bien avant, il sera le pourvoyeur du poison qui aura tué l'unique fille de la Lionne. De ses yeux il aura vu la lame d'une dague percer le cœur du Prince de Dorne, sans ciller. Témoin silencieux et consentant d'une rébellion sanglante à venir.

Mais ça… Il ne s’en souvient pas.

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